Parfois, il est plus dur de se lancer dans un compte rendu que dans une course : aujourd'hui c'est le cas !
Comment parler d'une course, non pardon d'une épreuve, car ici il n'y a pas de compétition juste une envie, de 18h00 remplies d'émotion ? peut-être par le commencement !


C'était il y a 18 mois lors de l'annonce de la première édition : La cannonball était présentée comme une course sans classement, donc sans compétition, qui suit une ligne naturelle de notre région : la pointe du Verdon - la pointe du Cap Ferret

en passant par où on veut : la plage ou la piste cyclable.

Je ne pouvais pas y participer pour cause de première participation à un véritable ultra : les Templiers. Du coup pendant 1 an, j'ai espéré que Gérard Caupène, le Gentil Organisateur, nous propose une deuxième édition. Finalement, face à la "pression", il nous proposa une deuxième et dernière édition, avec une organisation allégée : 4 ravitaillements en eau + 1 ravitaillement plus solide à mi-parcours, pas de dossard pour nous persuader que nous étions responsables de nous-mêmes entre chaque ravitaillement. Donc, pas d'assistance et quasiment pas de ravitaillement : il fallait tout porter soit même ... Gérard nous avait prévenu que c'était une épreuve difficile : on pouvait rajouter facilement 50 % de temps en plus par rapport à un 100 km (et encore pour les meilleurs).
Pour se préparer, j'ai suivi approximativement un entraînement 100km, approximativement car avec les vacances il n'est pas toujours facile de gérer son emploi du temps.
Côté matériel, je suis parti avec mon nouveau sac à dos choisi pour mon prochain défi la Trans Aq : le Salomon raid devil 25 qui présente l'avantage de posséder une poche ventrale. Côté habits, j'avais pour la nuit mes gants (à cause de mon syndrome de Reynaud), une micro-polaire et un coupe vent. De plus, il y avait une petite trousse de secours en cas de pépin, un baladeur mp3 en cas de gros coup de mou et évidement de quoi s'alimenter. Côté alimentation, l'organisation nous demandait (mais ne vérifiait pas) d'avoir 2x 600 kCal. Pour ma part, j'avais pris 10 barres d'Ovomaltine, 4 compotes à boire, 4 muesly et 300 g de mélange cacahouètes/pistaches.

Le jour J, direction Le Verdon en train depuis la gare de Bordeaux : l'occasion d'acheter le premier numéro sorti en kiosque d'Ultrafondus et de rencontrer dans le TER Olivier, un ovni (UFO) fort sympathique. Nous avons passé les 2h00 de trajet à essayer de dormir en prévision de la prochaine nuit... Ensuite comme la gare du Verdon ne se trouve pas à la pointe, nous avons eu le temps de discuter. Nous avons retrouvé l'organisation et les autres coureurs au bar l'Escale qui se trouve en face du bac pour Royan. Ce fut pour moi l'occasion de découvrir plein d'UFO, au palmarès très impressionnant ...
Après un petit briefing de Gérard qui met bien les points sur les i : nous sommes responsables de nous-mêmes, ils ne peuvent pas assurer la sécurité de 30 gugusses dispersés sur près de 50 bornes. Ensuite, il nous offre un choix cornélien : notre sac d'arrivée peut aller dans une voiture qui va directement à l'arrivée, mais alors nous devons être sûrs de finir ou bien il va dans le minibus où nous pourrons le récupérer en cas d'abandon, sinon le sac nous attendra après 20 heures de course à l'arrivée . Je pars confiant et je choisis l'option je suis sûr d'arriver en moins de 20h00. Ensuite direction la pointe du Verdon où j'apprends que mon numéro de "roadbook-dossard" a posé quelques soucis à l'organisation l'année dernière ( il a fini en hypo sur la plage en pleine nuit complètement perdu, secouru par un pêcheur ...) : tiens, j'ai un peu plus la pression ...



A midi pile, Gérard lance la course qui démarre à un petit rythme tranquille sur la plage obligatoire pour 1,2 km. Ensuite, je choisis l'option piste cyclable jusqu'à Soulac sur Mer. C'est une portion bien sympa qui suit approximativement le petit train touristique en pleine forêt. C'est également l'occasion de discuter avec d'autres coureurs de la région, tous partant pour une Trans Aq 2009 ! A Soulac sur Mer, l'appel de la plage est le plus fort : me voilà parti pour quelques dizaines de kilomètres sur la plage, environ 35 km jusqu'à Hourtin. Peu après Soulac, au km 15 et 1h30 de course, c'est le premier ravitaillement. Je récupère une bouteille d'eau : je vais le regretter car je ne vais pas la boire jusqu'au ravitaillement de Carcans plage !!! Par peur de ne pas avoir assez d'eau je vais me porter 1,5kg de trop... à l'arrivée, j'aurais les épaules talées et je sais pourquoi !

Je profite de longs moments de solitude et de plénitude sur cette plage sans fin. Je "profite" également de quelques nudistes. Certains semblent un peu interloqués de nous voir ici. Un cul nu viendra même à ma rencontre pour me demander si c'est une course. J'aurais droit également aux encouragements d'un surfeur prêt à s'élancer dans les vagues pour ce qui semblait être une compétition. Au Pin Sec (38 km et 4h10 de course) je ne lâche pas cette fichue bouteille, je refais le plein de la poche à eau. Je m'aperçois également que j'ai oublié mon répulsif contre les mouches plates : il faudra que je me batte contre elles ! Ensuite, par la plage, direction Hourtin (45 km et 5h00) où je récupère la piste cyclable.

Cette zone est très sauvage, la piste en béton en mauvais état est très agréable. Et puis l'ombre des pins fait du bien après 5h00 en plein cagnard !

Cette piste me rappelle plein de bons souvenirs avec Chris : notre première sortie en vélo, il y a longtemps, les enfants n'étaient pas encore là. En approchant de Carcans, le nombre de mouches plates augmentent : par moment 3 à 4 mouches se posent sur moi. Alors je m'arrête et je les attrape car ces garces se croient indestructibles, elles se laissent attraper. Il ne reste alors plus qu'à les écraser (difficilement il est vrai) entre les doigts. Je ne sais pas si c'est moi qu'elles piquent mais elles sont souvent gorgées de sang : je verais plus tard si des boutons apparaissent.
A la fin de cette zone, le ravitaillement solide de Carcans plage va faire du bien. Je commence à fatiguer après 60 km et 7h15 de course.

Auprès de bénévoles à nos petits soins, je commande une bonne petite soupe à la tomate bien chaude. Puis je me débarrasse enfin de cette bouteille et je prépare mes affaires pour courir de nuit : je m'attrape le coupe vent puis je place la frontale sur la poche avant ainsi qu'une grande partie du ravitaillement. Je repars en téléphonant à la petite famille pour donner des nouvelles. Le plus petit, qui a entamé mon capital sommeil les nuits précédentes avec sa gastro, va mieux : ils pourront donc me rejoindre demain à midi à la pointe du Cap Ferret. Je leur souhaite bonne nuit puis je me régale de quelques cacahouètes et pistaches en guise d'apéro et je repars direction Lacanau.

La nuit tombe doucement et je suis heureux d'être là même si un petit check up de la machine montre des faiblesses : les jambes sont douloureuses et j'ai les épaules bien talées par le sac. Courir commence à être difficile et je choisis prudemment de marcher vite et courir rarement. Un calcul vite fait me montre que si je maintiens une vitesse proche de 6 km/h je suis sûr d'arriver avant l'aube sur la pointe et de profiter du lever de Soleil. A partir de maintenant la piste cyclable sera toujours en très bon état et le paysage de nuit beau mais beaucoup moins sauvage qu'avant Carcans.
En passant à Lacanau, je rappelle Chris pour lui souhaiter une bonne nuit en lui précisant que j'essayerai de l'appeler depuis Le Porge si cela passe (vers minuit) et sûrement depuis le Truc Vert vers 3h00 du matin. La sortie de Lacanau par le parking sud est très longue mais le lecteur mp3 montre son utilité : sur Depeche Mode cela passe beaucoup mieux ... Les Canadiennes en profitent pour me doubler : je ne les reverrai pas ! Elles arriveront 40 minutes avant moi à la pointe. Plus loin sur la piste, je rajoute une couche avec ma micro polaire : le froid se fait vraiment sentir, en particulier dans les zones déboisées.
L'arrivée au ravitaillement du Porge (84 km et 11h 15 de course) est réconfortant. J'en profite pour discuter comme d'habitude avec les bénévoles qui sont adorables ! Nous profitons d'un lever de Lune magnifique dans les pins. Puis après un petit coup de fil à ma chérie qui va au lit, je repars à fond, c'est-à-dire environ 6km/h. Un peu plus loin une pause est nécessaire pour changer les piles du GPS (foretrex 101). Soudain, je suis éclairé par les phares d'une voiture qui arrive par la piste cyclable depuis Le Porge ! Je commence à pester en moi-même quand elle s'arrête à ma hauteur : il en sort Gérard qui a l'air vraiment content de me voir ! Il m'explique que le second m'a vu partir derrière lui au ravitaillement précédent (en fait il a confondu et c'était à Carcans je pense) et ne me voyant pas arriver il a prévenu Gérard. Je lui explique que j'ai choisi (enfin mes jambes ont choisi) de finir en marchant par la piste. Du coup, il repart rassuré à la recherche d'un autre concurrent !
Nous avons une chance incroyable d'avoir des organisateurs aussi attentifs !
Peu après j'arrive au dernier ravitaillement : le Truc Vert (105 km et 15h30 de course). Je m'assois 5 minutes pour discuter car je n'ai plus besoin d'eau pour finir. Ensuite une portion de 6 km de piste cyclable puis la plage où les pêcheurs se posent quelques questions en nous voyant passer clopin-clopant ! L'un d'entre eux m'arrête pour savoir d'où nous venons, il a bien essayé de demander au deux canadiennes mais quand elles l'ont vu approcher, il me raconte, amusé, qu'elles sont parties en courant !
Enfin, l'arrivée après 118 km et 18h00 de course : Caroline m'accueille. Il fait nuit et je suis heureux. Les bénévoles eux sont congelés et épuisés par nos arrivées au compte goutte. Après un petit encas à base de soupe de tomate, direction le stade du Cap Ferret, en minibus s'il vous plait, pour une douche bien chaude. En chemin le minibus se perd plusieurs fois car les bénévoles s'amusent à chercher le chemin le plus court : une bonne partie de rigolade! Dans le vestiaire, 2 coureurs cherchent à dormir. Pour ma part je préfère revenir sur la plage où les organisateurs ont installé une tente de la Trans Aq. Il est 7h00 du matin, le soleil n'est pas encore levé et je me glisse avec plaisir dans mon duvet pour 3 heures de sommeil. Tant pis pour le lever de soleil sur la dune du Pyla!


Vers midi je suis rejoint par ma petite famille pour acclamer les derniers et dernières cannonballeurs !

Ce fût une épreuve riche d'expériences et de découvertes :

  • la découverte d'une équipe d'organisation et de bénévoles formidable qu'il me tarde de retrouver sur la Trans Aq 2009.
  • la connaissance d'autres UFO qui rêvent eux aussi de découvrir le monde en courant, mais pas forcément sous forme de compétition.
  • le constat aussi que je ne suis peut-être pas encore prêt pour des épreuves beaucoup plus longues.

Sur ces 18h00, j'aurais fait 1h30 de pause et je me suis promené à une vitesse moyenne hors pause de 7,2 km/h